LA TRANSE DU BLANC
Le Vaudou, de toutes les rumeurs qui l’entourent, en colporte une, majeure : la TRANSE.
Les explorateurs, colons, soldats, prêtres et prédicateurs, de toutes les couleurs, de toutes les origines, de toutes les époques, et de toutes les obédiences ont réduit la perception du Vaudou à quelques épiphénomènes, à des caricatures commodes et simplificatrices, pour faire peur, pour imposer l’ordre importé et surtout pour consolider les conventions coloniales.
L’anthropologue tentera une hypothèse : le Vaudou serait un ordre social alternatif aux dérèglements de sociétés primitives ?
Les colonisateurs rétorqueront : Non, le Vaudou c’est l’anarchie primitive. Pire c’est le règne de la magie noire.
L’ethnologue cherchera : le Vaudou serait une religion animiste pour régler un nouvel ordre social ?
Les évangélisateurs affirmeront : non, c’est un creuset de désordres et de violences.
Certes, on ose plus sortir l’épouvantail du sauvage anthropophage à l’anatomie d’exception mais…
Pour les « prêtres » de toutes obédiences, le rejet du vaudou sera rassurant, comme une classification sans appel : chamanisme et charlatans, ésotérisme et fumisterie, religion et supercherie… bref le vaudou pourrait aussi ne pas être une affaire sérieuse !
Le regard des anthropologues, des ethnologues, des philosophes et plus récemment des intellectuels et des artistes a trop souvent été balayé par les « clichés », les stéréotypes et les cartes postales…Heureusement ces partisans de la réhabilitation du Vaudou semblent gagner du terrain. L’un des derniers Présidents élus du Bénin n’a-t-il pas proclamé que la souveraineté du Vaudou devait être restaurée dans le retour aux valeurs ?
Ici, au Togo, au Bénin, au Ghana, un « Blanc », un « Yovo » a succombé à la séduction des mamywatas, a cédé à l’attraction des sirènes, a découvert le « Fa ». Il a plongé dans la pratique du culte, rigoureux, de « Kokou » l’un des maîtres du vaudou, guerrier parfois et puissant comme tout Héviosso et Mamywata.
Jean Paul Christophe a fait le chemin de l’initiation abandonnant définitivement la rue de Miromesnil à Paris et son métier de marchand d’art contemporain. Il a gravi les échelons, atteint des grades. Il est le bokono « Christophe ». Il est aujourd’hui l’un des très rares occidentaux, houno, ayant le droit de recevoir en consultation les adeptes en souffrance ou dans le doute.
Son mentor était un personnage hors norme, quadragénaire massif, animant un temple actif dans Lomé et portant le nom d’un quartier lagunaire, en opposition depuis toujours aux pouvoirs : « Dékon ». Disparu prématurément en 2017 ce colosse avait pris Christophe sous sa protection.
M.A.
(Christophe et Nicolas Robert, photoreporter a Lomé, ont fait aussi un petit film de 25’, au commentaire un peu maladroit mais cela reste un document déjà diffuse par le Château Vaudou de Strasbourg.)